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Les interviews de Sexenbretagne :
[ Ressan, photographe de l'intime]
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Votre dernier ouvrage consacré à l'intime, vient de sortir. Vous vous éloignez un peu du milieu libertin ?
Ressan : je n'ai pas le sentiment de m'éloigner du monde libertin en revanche je souhaitai traiter autrement le couple et les espaces de jeux du couple. Mon travail est de contextualiser le couple dans ses différents univers, que ce soit à deux, trois ou plus. Paris libertin sorti il y a deux ans était plus focus sur les grosses soirées parisiennes qui montraient parfois 5 ou 10 couples entrain de jouer. Pour Ressan volume.2 j'ai beaucoup travaillé en province ce qui n'était pas le cas du premier qui était plutôt très parisien.
Comment a évolué votre travail depuis Paris Libertin ?
Ressan : Ce livre est très différent du premier, je n'avais pas envie de faire la même chose, je voulais épater par une certaine originalité. C'est toujours un exercice difficile de faire une suite, car il faut à la fois surprendre son lectorat celui qui me suit parfois depuis des années, et en même temps qu'il retrouve le style « Ressan ». ce nouveau livre montre des extérieurs que ce soit ma série Paris la nuit ou des situations en bord de mer. C'est aussi glamour et parfois tout aussi excitant que de montrer une soirée privée.
Vous préférez travailler dans des contextes plus intimistes ?
Ressan : C'est vrai que j'avais envie de montrer autre chose de l'intime, des situations plus érotisantes, je pense que la série que j'ai pu faire lors de soirées « eyes wide chut » donne une idée de ce que peut être une soirée haute gamme. C'était très plaisant de faire ces séries là car chacun sous son masque et sa cape à l'impression d'être quelqu'un d'autre. Le jeu de séduction est parfois plus simple, surtout pour les débutant qui sont parfois intimidés par des soirées de 60 ou 70 personnes.
Paris est pour vous une source d'inspiration inépuisable ?
Ressan : il m'est plus facile de faire des photos à Paris, pour plein de raisons, déjà parce que les soirées sont énormes et se font de dans des appartements magnifiques. En province la difficulté pour beaucoup de libertins est de ne pas croiser son banquier ou la maitresse d'école du fiston, à paris la probabilité est moindre. Pour autant les photos que j'ai réalisé paris la nuit sont pour moi d'une force incroyable, je les ai faites la nuit car les lumières sont belles et puis la photo exhibe c'est pas du tout mon truc.
Certaines de vos images sont-elles volées, ou bien sont-elles toutes mises en scène ?
Ressan : je ne vole jamais d'image, lorsque j'arrive à une soirée privée chacun des participants est prévenu de ma présence. Jamais je ne fais des photos à l'insu de personnes, alors que la plupart des couples sont très fiers de participer à mes projets. Je me suis même fait engueuler, enfin gentiment car certaines personnes n'étaient pas dans ce livre. Lorsque j'ai travaillé sur mon premier livre en 2015 « Paris libertin » beaucoup ont souhaité être présents dans le second. Aujourd'hui ma notoriété dans le monde libertin est telle que je n'ai pas vraiment besoin de me présenter, la confiance que les gens me font se mérite dans le temps.
Vous êtes presque devenu le photographe officiel de la communauté libertine. Comment avez-vous réussi à vous faire accepter ?
Ressan : Cela fait trente ans que je photographie le monde libertin, peu de libertins n'ont jamais entendus parler de moi, cela me rend la tâche plus facile. Etre dans un livre qui sera parcouru par des milliers de gens est aussi excitant pour la plupart des gens, le fait de rester anonyme tout en s'exhibant sans prendre le risque d'être reconnu en raison du fait que l'on ne voit jamais les visages, rend la situation particulièrement excitante.
Quelles sont les limites que vous établissez avec vos modèles, par rapport à ce qu'ils veulent, ou non, montrer ?
Ressan : je me force jamais à faire des photos, si les gens ne m'intéressent pas pour X raison, je ne fais pas. Cette décision ne repose pas seulement sur un physique mais sur un état d'esprit. J'ai besoin de me sentir bien avec les gens, j'ai besoin de les sentir bien dans leur tête et surtout sur la même longueur d'onde. Je déteste par exemple les gens qui m'abordent en me disant «Je veux faire une surprise à ma femme» à ce moment-là ils confondent un plan cul avec mon travail, dans ce cas je décline de suite. Pour ce livre j'étais en contact avec un libertin Marseillais qui est sur un fauteuil roulant, je l'ai sollicité pour faire une image très précise, il m'a de suite dit ok, j'avais une image en tête, quelque chose de très symbolique qui ne l'exposait évidemment pas à une attitude dégradante ou ridicule, nos agendas ne coïncidaient pas, malheureusement on a pas pu faire cette séance.
Vos images sont-elles très retravaillées ?
Ressan : Je travaille mes images mais je ne retouche jamais les gens, je prends les gens comme ils sont, à partir du moment ou ils évoquent en moi quelques idées intéressantes. Je ne suis pas à la recherche de bimbo, je dirais même c'est tout l'inverse, car les femmes dans mon livre ont plutôt entre 35 et 50 ans avec des formes très différentes des unes des autres. On n'est pas dans de la photo de mode, je suis dans la vraie vie. Les gens qui achètent mon livre y voient des gens qui leur ressemble.
Paris est-elle encore une « capitale du plaisir » ?
Ressan : Je pense que Paris est la capitale du plaisir elle l'est pas seulement dans l'imaginaire collectif mais elle tout court. L'an dernier je suis allé présenter mon livre à Miami aux USA, j'ai été étonné de voir comment ils parcouraient mon livre avec une certaines envie et curiosité. On représente à la fois la subtilité, une certaine finesse et surtout une grande liberté au sexe. Comparé à eux ou tout est organisé tout est codifié.
Vous avez-vous–mêmes été tentés par le libertinage ?
Ressan : je pense que si tel était le cas je ne serais plus là depuis déjà longtemps. La distance que j'ai vis-à-vis des couples que je photographie me donne une légitimité que peu de photographes peuvent avoir surtout dans le milieu libertin. On ne me perçoit pas comme un prédateur près à tout pour sauter sur une femme mais plutôt comme un artiste qui fait son travail avec sincérité.
Quels sont vos maîtres en photographie ?
Ressan : Curieusement les photos que j'aime ne font pas du nu, à part peut être Helmut Newton que j'ai eu la chance de côtoyer lorsque j'étais jeune, Jeanloup Sieff, les autres sont Henri cartier-Bresson ou Robert Doisneau. Ils ont en commun d'avoir photographier des êtres humains. Lorsque je photographie y compris dans des immenses orgies, je photographie des êtres humain, je fais abstraction qu'ils sont nu ou en train de faire l'amour (et encore je reste poli)
Comment voyez-vous évoluer les pratiques sexuelles libertines ?
Ressan : je pense que les codes évoluent dans le milieu libertin. Les femmes y ont trouvé une place plus respectueuse, dans le sens ou les rapports homme/femme sont de plus en plus équilibrés. Si je comptabilise le nombre de femmes présentes dans mon dernier livre, beaucoup viennent aux soirées en femmes seules, ce qui était impensable il y a déjà quelques années. D'ailleurs c'est une des raisons pour lesquelles, l'internet a permis aux femmes de vivre leur sexualité comme les hommes pratiquent. Avant l'arrivée d'internet il était impossible d'aller seule en club pour y faire des rencontres sans paraitre aux yeux de beaucoup comme de « vulgaires salopes» , aujourd'hui elles s'inscrivent sur un site de rencontre et peuvent en fonction de leur critères faire les rencontres qu'elles veulent.
Vous vous intéressez aussi à l'univers du SM ?
Ressan : l'univers du SM m'intéresse car il est souvent subtil et répond à des codes très différents du mon libertin. Beaucoup s'imaginent que le plaisir serait juste de faire du mal ou de subir. Dans ces relations tout se passe avant tout dans la tête. J'ai assisté à des situations qui de prime abord pourraient paraitre violentes, or il n'en est rien. Chaque fois que j'ai pu discuter avec des femmes qui se disaient soumises, peu le sont dans la vraie vie. C'est pour elles une manière d'exulter justement une position dominante dans la vie. Je ne connais pas une femme qui serait humiliée par son mari ou son employeur venir prendre du plaisir à se faire fouetter. En revanche il y a bien plus d'hommes soumis qu'on le pense, toujours pareil avec des positions sociales élevées. Je me souviens d'un procureur qui venait se faire soumettre chez une domina, il était ce que beaucoup de femmes font, c'est aussi simple que ça !
Ou peut-on acheter ton ouvrage ?
Ressan volume.2 est en vente sur mon site : www.ressan.fr
196 pages couleurs en format 30X30 ( 59€)
facebook : ressan.art
instagram : ressan.art
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